Du jour du chatouillis
Le jour du chatouillis est un jour particulier dans la vie d’une femme.
C’est un jour que chacune d’entre nous redoute en général, mais qui finit par arriver, incontournablement…
Le jour du chatouillis, c’est le jour où une mère « laisse » pour la première fois son tout petit aux soins d’une nounou, d’une mamie, d’une puéricultrice de crèche, bref de toute personne adulte de sexe féminin revêtant à ce moment précis l’allure d’un monstre sanguinaire aux crocs menaçants…
Ce jour là, la mère, appelée par les impératifs futiles et dérisoires qu’incombent à une vie de femme active, se voit pieds et poings liés, contrainte de commettre l’irréparable en abandonnant son petit enfant aux babines luisantes de la bête sanguinolente…
C’est en général juste après cet acte abominable que le chatouillis arrive…
C’est le frottement de l’écharpe contre sa joue, la bise fraîche de l’hiver, le courant d’air de la portière…
Qu’importe ce qui déclenche le chatouillis car à cet instant, la mère sent monter en elle toutes les larmes de son corps et en moins de deux, se transforme en flaque d’eau…
C’était aujourd’hui, pour moi, le jour du chatouillis.
C’était en fait le troisième jour du chatouillis de ma vie…
Et pourtant, je n’ai pas échappé à la liquéfaction…
Néanmoins, je le sais à présent, rien ne sert de résister au chatouillis, parce que sinon, l’eau monte, monte, gonfle sous la peau et on finit noyée dans son chagrin…
Non, non, pas de risque de noyade pour moi….
Et puis ce soir j’ai retrouvé ma solution de réhydratation : les merveilleuses joues de mon fiston…